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Piotr Illitch Tchaikovski (1840-1893)

Piotr Ilitch Tchaïkovski est né le 7 mai 1840 à Votkinsk dans l' Oural en Russie. Il était le deuxième fils d'un ingénieur des mines Ilia Petrovitch Tchaikovski et d'Alexandra d'Assier, descendante d'une famille française. Ilia semble avoir été un homme de caractère plutôt sentimental amoureux de musique et de littérature. Alexandra, fille du Marquis André d'Assier, est une femme d'une grande beauté mais qui semble avoir été atteinte d'une certaine instabilité psychique. Dès son plus jeune âge, et comme la plupart des grands compositeurs, il montre des dons musicaux hors du commun. Son institutrice, une Suissesse lui donne une éducation essentiellement française et favorise ses dons musicaux. A l'âge de huit ans, il s'installe avec sa famille à Moscou puis il est envoyé à Saint-Petersbourg pour y étudier le droit. Il reçoit ses premiers cours de piano à l'école Schmelling. En juin 1854, sa mère décède à la suite d'une épidémie de choléra. Piotr Illitch en reste inconsolable.

En 1859, Tchaikovski entre comme secrétaire au ministère de la justice mais envisage sérieusement de faire de la musique son métier. A la suite de revers financiers de son père, il entretient temporairement la famille jusqu'en 1862 alors qu'il aurait aimé devenir immédiatement compositeur. Il se met à étudier la composition auprès d'Anton Rubinstein pour lequel il éprouvera toujours une vive admiration. Il s'inscrit dès l'année suivante au conservatoire et renonce à sa carrière de juriste mais connait alors des difficultés financières importantes et mène une vie presque miséreuse. Il continue à prendre des cours de piano, composition et harmonie. En 1865, Nicolas Rubinstein, le frère d'Anton, crée le conservatoire de Moscou et invite Tchaikovski à y enseigner l'harmonie, poste que Piotr accepte malgré la modeste rémunération. Rubinstein présente son jeune protégé à tous ses amis. A cette époque, Tchaikovski compose sa première symphonie "Rêves d'hiver". Anton Rubinstein est très critique, par contre le fameux groupe des cinq, accueille avec enthousiasme cette symphonie qui a une âme russe. Tchaikovski a connu le groupe des cinq en 1868. Plus tard, les rapports seront assez tendus, le compositeur n'ayant une réelle estime que pour Rimski-Korsakov. Deux opéras Voïevode et Ondine ont moins de succès mais peu à peu, Tchaikovski se forge une solide réputation dans le milieu musical. Il noue avec Balakirev des liens d'amitié et compose alors Roméo et Juliette.

Entre 1869 et 1875, la carrière de Tchaikovski prend un essor formidable. Il compose un nombre très important d'oeuvres. Le musicien loge chez Nicolas Rubinstein mais n'est pas à l'aise car cette maison est ouverte à de nombreux habitués et il aspire à un univers plus calme. Toute sa vie, il ne sera nulle part chez lui. En 1871, il termine son premier quatuor à cordes qui sera couronné de succès. En 1873, il compose La tempête oeuvre pour orchestre. Les années suivantes sont une période créatrice. Il compose les quatuors à cordes n°2 et n°3, son premier concerto pour piano, l'un des plus joués du répertoire, et Vakula le forgeron un autre opéra. En 1875, il commence sa troisième symphonie et écrit le Lac des Cygnes, ballet dont la première en 1877 sera un échec ! Toutes ces oeuvres et bien d'autres ne reçoivent qu'un accueil réservé ce qui a pour effet de rendre Tchaikovski dépressif. Son premier grand succès viendra en 1871 avec le quatuor à cordes n°1 et quelques pièces pour piano au cours d'un concert de musique de chambre. Opritchnik est un opéra qui connaitra également le succès auprès du public mais qui sera férocement attaqué par la critique. Tchaikovski profite de ces quelques succès pour voyager en Europe et améliorer ainsi sa santé nerveuse fragile. De passage à Weimar, il aura l'occasion d'entendre la tétralogie de Wagner qu'il trouvera fatigante et emphatique. En 1874, il compose et dédicace son concerto pour piano n°1 à Nicolas Rubinstein lequel, est-ce par jalousie ?, déclarera cette pièce "si mauvaise qu'elle lui donne la nausée!". Blessé et irrité, il supprimera la dédicace et l'enverra à Von Bülow qui fera de l'oeuvre un triomphe jamais démenti depuis. Rubinstein présentera ses excuses et en fera un de ses morceaux de concert favori.

En 1876, Tchaikovski correspond avec la très riche Madame von Meck à la suite d'une commande (un arrangement pour violon et piano) qu'elle lui avait passée. Cette correspondance deviendra un amour par correspondance. Par accord tacite, ils ne se rencontreront jamais. Cette solution arrange Tchaikovski qui évite de s'engager dans une relation incompatible avec son homosexualité. Le compositeur écrit ensuite deux de ses oeuvres majeures : la quatrième symphonie et l'opéra Eugène Onéguine. Il est au sommet de son art. Une jeune femme, Antonina Ivanovna Milioukova, lui envoie des lettres d'amour enflammées et Tchaikovski accepte de la rencontrer après qu'elle ait menacé de se donner la mort s' il refusait. Le compositeur fera une offre de mariage sans en mesurer toutes les conséquences. Ce mariage, qui sera immédiatement catastrophique, est célébré en juillet 1877. Tchaikovski trouve tous les prétextes pour s'éloigner de son épouse et il est psychologiquement très atteint. Il se séparera de son épouse peu de temps après grâce à l'entremise de Nicolas Rubinstein. Mme von Meck lui alloue alors une bourse qui le met à l'abri des soucis financiers pendant treize ans. En 1878, il compose son superbe concerto pour violon.

Tchaikovski traverse les années suivantes une période de doute en ses capacités et la qualité de ses oeuvres s'en ressent particulièrement. De cette période, de 1878 à 1886, seule l' Ouverture 1812 est restée populaire, oeuvre qu'il qualifiait lui-même de bruyante et écrite sans goût. Il écrira pourtant un superbe Trio pour piano et violoncelle op.50 dédié à la mémoire de feu Nicolas Rubinstein. A partir de 1880, Tchaikovski reprend goût à la vie. Il réussit à maintenir un certain équilibre psychique. Il se rend en Italie et fait de longs séjours à Florence dans une propriété de Mme Von Meck. Il composera alors quelques chefs d'oeuvre : Capriccio italien, l'opéra La Dame de Pique, le sextuor à cordes "Souvenir de Florence"...En 1885, il acquiert une maison de campagne et réalise là l'un de ses voeux les plus chers.

En 1886, il effectue une tournée dans le Caucase où il obtient des succès extraordinaires qui le bouleversent. Tchaikovski s'essaye à la direction d'orchestre non sans une certaine réussite. Il dirigera avec succès plusieurs de ses oeuvres en 1887 à St Petersbourg et Moscou. En 1888, il entame une série de concerts européens, à Londres, Hambourg, Prague, Paris, Berlin... partout acclamés, et qui lui permettra de rencontrer Brahms, Grieg, Dvorak, Gounod, Fauré...Ayant retrouvé tous ses moyens artistiques, il compose son deuxième ballet La belle au bois dormant qui n'aura pas le succès espéré. Mme von Meck lui annonce par lettre qu'elle est ruinée et qu'elle ne peut plus lui verser sa bourse et cesse leur relation "postale". En réalité, elle apprend l'homosexualité de Tchaikovski et, blessée dans son idéal, rompt avec le musicien. Nouvelle déception pour le compositeur.

Au cours des dernières années, il compose au autre ballet Casse-noisettes, sans doute le plus célèbre, et Iolenta un autre opéra. Il part pour une tournée de concerts aux Etats-Unis. Il a le droit à un accueil chaleureux de la part du Carnegie Hall le 5 mai 1891. Mais il est à nouveau assailli par les doutes et les pires angoisses. En 1892, casse-noisettes fait un triomphe. En 1893, il compose sa symphonie dite "pathétique" la sixième. Lui-même estime qu'il s'agit de la meilleure oeuvre qu'il ait jamais composée et dans laquelle il a mis "toute son âme". Le 28 octobre, il est au pupitre pour la première qui est loin d'obtenir le succès escompté. Le 6 novembre 1893, Tchaikovski meurt du choléra après avoir bu de l'eau de la Néva non bouillie. Certains pensent, sans preuve, qu'il s'est suicidé ou a été empoisonné suite à la dénonciation publique de l'homosexualité du compositeur en raison d'une relation avec le neveu d'une noble russe.

Le langage musical de Tchaïkovski a été fortement influencé par les romantiques allemands et Hector Berlioz pour l'orchestration. Son oeuvre est également porteuse de la tradition russe initiée par Mikhaïl Glinka. D'une sensibilité très vive, sa musique est mélodique et est souvent richement orchestrée. Pour certains critiques elle paraît parfois d'une réalisation un peu facile. Néanmoins Tchaikovski est le maître de toute une génération de musiciens russes et compte parmi les rares compositeurs qui n'ont pas été étouffés par l'aura de Richard Wagner.